samedi 21 février 2009

La Fuite.


La table rectangulaire se dressait contre le mur, sous la baie vitrée. Le balcon était en hauteur. Pour y accéder il fallait grimper sur la table. Ma mère m’y jucha et mon père, qui nous précédait, me prit par le bras. Nous allâmes jusqu’au bout du balcon, devant un fenestron que mon père ouvrit. C’étaient les cabinets. Ils attenaient au bureau du directeur, qui lui, avait déjà rejoint la métropole. La pièce était vaste et luxueusement meublée, même le bureau. Dans mon souvenir, couleur acajou. les persiennes étaient closes, mais le soleil d’Afrique se glissait entre les lames de bois. Mon père ouvrit un tiroir et en saisit un automatique.


J’avais quatre ans.


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Dans la cour de l’école, qui était vaste et toute blanche de lumière et de sable, un arabe en djellaba s’accroupit pour se mettre à ma hauteur. Il tenait un fusil et me tendit un bonbon. Mon bras se tendit, mais ma mère me le rabattit avec brutalité.


Pas de bonbon pour la petite fille. L’homme me parlait avec douceur.


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Dehors, la fourgonnette (la même en tôle ondulée que celle de « Louis le Brocanteur ») des gendarmes nous attendait. A l’intérieur, une femme pieds nus, les jambes en V, le dos contre une paroi, sanglotait à grand bruit.


Moi, on me cala à l’avant de la camionnette, entre les deux gendarmes, une fesse sur chaque barre des sièges de la Citroën. Mon père était debout sur le marchepied droit, se cramponnait de la main gauche au rebord intérieur de la portière et il tenait l’automatique de la main droite.


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Une maison avec un péristyle, comme celles des états sudistes d’Amérique. Un paon y faisait la roue.


Encore une grande pièce aux volets fermés, mais la lumière y était allumée. Une grande table et un long buffet bas avec un voilier dans une bouteille.


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Ma mère me saisit et me jette par la fenêtre dans les broussailles. La fenêtre est basse et on peut l’enjamber facilement.


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Dans l’avion, ma mère mange dans un plateau à compartiments. Il y en a un exprès pour la petite bille blanche que je vois. Ma mère me la tend et je l’avale. Première rencontre avec du chewingum.


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Je ne me souviens de rien d’autre de ce rapatriement du Maroc.